Pourquoi Facebook ?

Publié le par Sana Bachri

Le choix de Facebook parmi d'autres réseaux sociaux n'était pas anodin. En effet, dès les débuts du réseau social des gens de toutes les régions du monde se sont inscrits. Il s’avère que les activistes se trouvant en dehors de la Tunisie ont pu communiquer de manière beaucoup plus sécurisée avec nous, les activistes de l’intérieur. Avant cela, à cause de la censure, j'avais des moyens très restreints pour communiquer avec l'extérieur. Nous manquions alors de beaucoup d'informations et surtout des plus importantes.

Ensuite, il ne faut pas omettre que presque tous les réseaux sociaux ou blogs importants étaient censurés d'une manière ou d'une autre. L’accès n’était pas forcément interdit mais beaucoup de contenus étaient inaccessibles. Twitter était un des seuls « réseau social international » autre que Facebook. Mais sur celui-ci le nombre de caractères est limité à 140 ce qui freine beaucoup la communication. De plus l'impossibilité de faire des groupes de discussions privées a fait que nous avons largement moins utilisé Twitter que son rival Facebook.

Si Facebook a subi une sorte de montée en puissance à partir de 2008 c'est, en partie, dû au fait que le gouvernement tunisien s'est trouvé dans l’incapacité totale de censurer le site. En effet, lors de sa création Facebook ne servait pas encore de moyen de partage d’information en rapport avec le régime tunisien et il n’était pas très important dans le pays. Le gouvernement avait donc décidé de ne pas le censurer car cela lui permettait de donner une bonne image aux autres pays ; une image de « pays démocratique ». Les sites comme YouTube ou même Dailymotion étaient censurés. Facebook et Twitter étaient donc les deux seules grandes plateformes de partage international qu'il nous restait à ce moment-là. Malheureusement, le 24 août 2008 Facebook est censuré. Cela a mené à une telle protestation que le gouvernement s'est empressé de le rouvrir, début septembre l'accès au site était de nouveau possible. C'est cette décision-là, prise par le gouvernement, qui a fait que les réseaux sociaux sont devenus par la suite le véritable enjeu de notre révolte. Cet événement nous a particulièrement fait réagir à l'intérieur du pays mais a aussi par la suite eu un impact à l’échelle internationale. Lorsque la censure de Facebook a été levée de plus en plus de gens ont commencé à s’en servir. Des manifestations ont été organisées. De plus en plus de gens y ont participé jusqu’à celle de janvier 2011.

Je me sens obligée de mentionner cet évènement, l'immolation par le feu de Mohamed Bouazizi devant le siège du gouvernorat de Sidi Bouzid. C'était fin 2010, les photos et vidéos de sa tentative de suicide on fait le tour de la toile en quelques heures. Le monde était révolté. Il nous a malheureusement quittés suite à ses blessures début janvier, en 2011. C'est l'un des évènements déclencheurs des émeutes de janvier. Celles-ci ont fait inverser les choses, des milliers de personnes manifestaient dans la rue et la police était moins nombreuse que nous. Nous nous sommes tous réunis en criant une bonne fois pour toute, à l’unisson, « DEGAGE ». Le lendemain, Ben Ali a donné un discours partagé sur toutes les chaînes de télévision au niveau national et mondial dans lequel il annonçait sa démission. Nous avions enfin gagné notre combat !

« Je quitte, maman, pardonne-moi, les reproches sont inutiles, je suis perdu sur un chemin que je ne contrôle pas, pardonne-moi, si je t’ai désobéi, adresse tes reproches à notre époque, pas à moi, je quitte et mon départ est sans retour, j’en ai marre de pleurer sans larmes, les reproches sont inutiles dans cette époque cruelle, sur cette terre des hommes, je suis fatigué et je ne retiens rien du passé, je quitte en me demandant si mon départ m’aidera à oublier. »

« Je quitte, maman, pardonne-moi, les reproches sont inutiles, je suis perdu sur un chemin que je ne contrôle pas, pardonne-moi, si je t’ai désobéi, adresse tes reproches à notre époque, pas à moi, je quitte et mon départ est sans retour, j’en ai marre de pleurer sans larmes, les reproches sont inutiles dans cette époque cruelle, sur cette terre des hommes, je suis fatigué et je ne retiens rien du passé, je quitte en me demandant si mon départ m’aidera à oublier. »

En tout, aujourd'hui, 3,4 millions de tunisiens sont inscrit sur Facebook, faisant de la Tunisie, le 47ème plus gros pays du Monde en termes de nombre d’inscrits. Le pays a ainsi gagné 4 places depuis 2011. C’est aussi le 10ème pays Africain en nombre d’internautes et le nombre d’abonnements à internet a augmenté de 160% de 2009 à 2012.

Publié dans Politique

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